Agri-Sahel

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Nourrir la ville de demain : exploitation familiale ou agrobusiness ?

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A l’image de l’Inde, la Chine et du Brésil, l’Afrique est résolue à réaliser sa révolution verte. Pour cela, les politiques agricoles soutenues par les bailleurs de fond encouragent l’agrobusiness. Une situation qui semble inquiéter les petits producteurs agricoles qui y voient un accaparement progressif des terres agricoles et une mort programmée des exploitations familiales africaines sources de revenue de plus de 65 % de personnes en Afrique.

 

 700 milliards d’euros, soit environ 45.920 milliards FCFA. C’est le montant qu’il faudra injecter dans l’agriculture d’ici à 2050 au niveau de l’Afrique subsaharienne, selon la FAO pour accroitre la productivité. L’enjeu est de pouvoir nourrir la population de cette partie de l’Afrique qui devrait atteindre 1,5 milliard à 2 milliards d’habitants dans les trente prochaines années.75% de ces investissements devrait être destiné à la promotion de l’agrobusiness. On estime que l’agriculture familiale en l’état actuel n’est pas à même d’assurer une sécurité alimentaire durable en Afrique parce que très peu modernisée et non compétitive
Parmi les ténors de cette vision, figurent des institutions comme la banque mondiale, l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) et l’Alliance pour la Révolution verte en Afrique (AGRA). « L’agriculture ne doit plus être vue comme un moyen de subsistance mais un business comme tout autre » a déclaré le vice-président du Conseil d’administration de l’AGRA, Strive Masiyiwa, lors du forum de l’alliance la révolution verte qui s’est tenu en septembre dernier à Maputo (Mozambique). Il s’agit d’aller vers une agriculture de type entrepreneurial, mobilisant des capitaux privés nationaux ou étrangers. En 2011, un rapport publié par l’ONUDI intitulé « L’agrobusiness au secours de la prospérité de l’Afrique », considère l’agrobusiness comme un vecteur essentiel dans le développement économique de l’Afrique : « afin d’accélérer, de façon durable et exhaustive, la croissance et le développement en Afrique, il est urgent de favoriser une nouvelle approche de la notion de développement ; approche basée sur l’exploitation exhaustive du potentiel agricole du continent. Celle-ci pourrait se fonder essentiellement sur l’accroissement de la valeur ajoutée de l’agrobusiness et de l’emploi, tout au long de l’ensemble de la chaîne de valeur de l’agrobusiness qui comprend l’agriculture elle-même ainsi que l’industrie et les services qui en dépendent ».Les politiques qui encouragent l’agrobusiness, estiment qu’elle pourrait, contrairement à l’agriculture familiale, permettre de fournir des intrants aux agriculteurs et les mettre en contact avec les consommateurs par le biais de financements, de la transformation, du stockage, de la commercialisation et de la distribution des produits agricoles.
Selon la Banque mondiale, il y a un écart considérable entre la part de l’agriculture dans le PIB (12 à 15% dans les pays d’Afrique subsaharienne pour la période allant de 1990 à 2006) et sa part dans la main-d’œuvre. En effet selon l’Organisation internationale du travail (OIT), l’agriculture représente 65 % du nombre total d’emplois en Afrique Subsaharienne. Cette faible productivité est en déphasage avec la croissance rapide de la population, selon la FAO qui estime que l’augmentation de la production agricole repose plutôt sur l’expansion des terres de culture ou d’élevage que sur une quelconque amélioration des moyens de production. D’où la nécessité pour les États de fournir des efforts pour améliorer la productivité et la compétitivité de leurs systèmes agroalimentaires en assurant, dans le même temps, des moyens de subsistance viables qui génèrent assez de nourriture, de revenus et d’emplois .
Cet appel à la promotion de l’agrobusiness a été bien accueilli par les gouvernements africains. Au niveau de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), les représentants des producteurs notamment le Réseau des organisations paysannes et de producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA) sont tout de même parvenus à faire prévaloir une politique agricole qui s’appuie sur la modernisation des exploitations familiales. Les concertations ont permis de s’entendre sur le fait qu’aucune des formes d’exploitation ne doit être exclue.
Toutefois, aujourd’hui encore, le débat est loin d’être épuisé. Les organisations paysannes pensent qu’en réalité, les décideurs sont plutôt préoccupés par la recherche d’investisseurs étrangers que de renforcer les capacités des petits exploitants.



Par Fatouma Ouattara



18/12/2013
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